La “notoriété publique” au secours de l’état-civil.

Il y a peu d’occasions dans une vie où l’on doit attester la date et le lieu de sa naissance. Le mariage en est une.

Depuis le début du XIXe siècle et la promulgation du code “Napoléon”, la production d’un extrait de son acte de naissance porté dans les registres d’état-civil de sa commune d’origine, est impérative pour pouvoir se marier civilement. Avant de passer dans la “maison commune” chacune des parties doit être en capacité de présenter ce document à l’officier public chargé de rédiger l’acte.

Il est rare que cette production de pièce pose souci du fait de la bonne tenue des registres de l’état-civil français. Ce fut pourtant ce qui arriva à Gabriel Guilloux en 1830, alors qu’il envisageait de s’unir avec Antoinette Germain de Billom : les registres d’état-civil de sa commune d’origine, Chas, ne portaient pas mention de sa naissance.

Comment une naissance peut-elle ne pas être reportée dans les registres d’état-civil ? Les heures qui séparent la naissance d’un enfant jusqu’à la rédaction de l’acte peuvent expliquer ce manquement.
En effet, si les preuves de mariage sont systématiquement couchées dans les registres, puisque rédigés dans l’instant en présence des futurs mariés, la situation est toute autre lorsqu’il s’agit de constater la naissance ou le décès d’un individu. Dans les deux cas, la rédaction est postérieure à l’événement qui, de surcroît, n’est connu que s’il est rendu public et rapporté par un membre de la famille ou un voisin.

Ainsi, dans le cas d’une naissance, la tradition veut que ce soit le père de l’enfant qui se déplace en mairie pour présenter l’enfant : le plus souvent le jour même si le bébé est né dans la nuit ou tôt le matin, sinon, le lendemain.

Pour un décès, c’est généralement un parent ou un voisin qui effectue la déclaration, à peu prêt dans les mêmes délais, après quoi l’officier de l’état-civil se déplace au domicile du défunt pour effectuer les constatations d’usage.

Alors, dans le cas de Gabriel Guilloux, oubli ou “empêchement” du père qui n’a pas présenté l’enfant en mairie ? Manquement de l’officier dans la rédaction de l’acte ?

Quoi qu’il en soit, devant l’absence de mention de sa naissance dans les registres de Chas, Gabriel Guilloux a dû faire appel à un notaire pour rédiger un acte de notoriété. Généralement utilisé dans le cadre de successions, ce type d’acte notarié constitue une preuve de la qualité juridique des héritiers, mais plus exceptionnellement il peut être utile pour attester sa naissance.

Voici la transcription de l’acte conservé dans les archives du tribunal civil de Clermont-Ferrand (consultable aux archives départementales du Puy-de-dôme, document U 21869, cote 68), produit par Gabriel Guilloux le 26 juillet 1830 en mairie de Billom :

Aujourd’hui vingt deux + [mai – renvoi en marge]de l’an mil huit cent trente, par-devant nous, Pierre-Charles-Casimir de Chaudesaigues de Tarrieux, juge de paix du canton de Vertaizon, département du Puy-de-dôme, assisté de Pierre Royer, greffier de notre justice ;

Est comparu en notre hotel à Saint-Bonnet, Joächim Guilloux, propriétaire-cultivateur, habitant la commune de Chas, lequel nous a exposé que de son mariage avec Jeanne Germain est issu un fils nommé Gabriël Guilloux dont l’acte de naissance ne se trouve point inscrit sur les registres de l’état civil de ladite commune de Chas # [ainsi qu’il résulte d’un certificat délivré par Mr. le maire de ladite commune le vingt un du présent mois – renvoi en marge]et que son dit fils étant sur le point de contracter mariage avec un parti sortable à sa condition, il s’en trouve empéché par la non insertion de son acte de naissance sur lesdits régistres, pourquoi il nous a présenté sept témoins, en tel cas requis, pour nous faire déclarations sur les nom et prénom de son dit fils, l’époque et le lieu de sa naissance et les causes qui l’empèchent de produire l’acte.

Ces témoins sont Rémy Guilloux, agé de quarante sept ans, Marie Guilloux, fille majeure agée de cinquante cinq ans, Antoinette Guilloux, veuve de Pierre Germain agée de soixante trois ans, Marie Germain, épouse d’Antoine Vidal agée de trente six ans, de la profession de cultivateur, habitans de ladite commune de Chas, Antoinette Germain épouse d’Antoine Sauze, agée de quarante un ans, Claude Sauze agé de quarante cinq ans et Jeanne Germain épouse dudit Claude Sauze agée de quarante neuf ans, aussi de la profession de cultivateur, habitants de la commune de Chauriat et parents dudit exposant, lesquels témoins nous ont déclaré en leur ame et conscience, que les prénom et nom du fils de l’exposant, sont Gabriël Guilloux et de Jeanne Germain, qu’il est né en la maison de ses dits père et mère le quatre novembre mil huit cent deux audit lieu de Chas, et qu’on ne peut imputer qu’à omission la cause de la non insertion de l’acte de naissance dudit Gabriël Guilloux dans les régistres de l’état civil de ladite commune.

De laquelle déclaration nous avons donné acte et de tout ce que dessus, nous avons dressé le présent acte dont lecture a été faite à l’exposant et aux témoins et que nous avons signé avec Joächim Guilloux et le greffier, les témoins ayant déclaré ne savoir signer de ce enquis, les jour, mois et an que dessus.

[Signatures : Royer, greffier ; Guilloux, Casimir de Tarrieux]

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